LE RÔLE DES DIASPORAS DANS LE FINANCEMENT ET LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE EN AFRIQUE DE L’OUEST

LE RÔLE DES DIASPORAS DANS LE FINANCEMENT ET LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE EN AFRIQUE DE L’OUEST

La diaspora épargne environ 53 milliards de dollars par an.Du côté de la diaspora comme des autorités des pays d’origine, la route est encore longue pour mettre ces ressources au service du développement. L’émission d’« obligations diaspora » apparaît comme un scénario gagnant des deux côtés.Telle est la situation des pays en développement, d’Afrique de l’ouest notamment, qui espèrent l’aide financière de leur nombreuse population émigrée qui vit et travaille à l’étranger, souvent dans des pays au revenu plus élevé.

Pris séparément, les revenus de cette diaspora sont souvent modestes au regard des standards des économies riches, et son épargne peut apparaître bien maigre compte tenu des besoins de financement du développement. Or, comme le montre l’ouvrage Diaspora for Development in Africa dû à deux économistes de la Banque mondiale, la diaspora peut collectivement accumuler d’énormes sommes d’argent.

Ainsi, à l’échelle mondiale, la diaspora africaine épargne quelque 53 milliards de dollars par an, dont plus de 30 milliards sont mis de côté par des émigrés originaires d’Afrique subsaharienne.Le potentiel offert par la diaspora africaine pour le développement « ne se limite pas à l’envoi de fonds », indique Sonia Plaza, économiste principale au sein du Groupe des perspectives économiques. Et, précise Dilip Ratha, qui dirige le service Migrations et envois de fonds, un État doit considérer sa diaspora comme « un gisement de pétrole inexploité ». Il ne s’agit pas d’une manne de revenu uniquement mais aussi d’un « capital humain » forgé par le savoir et la compétence acquis à l’étranger et qui constitue, face à la fuite des cerveaux, une ressource cruciale pour les pays d’origine.

Le rôle de la diaspora sur le développement en Afrique existe déjà de façon informelle ou à petite échelle. Les membres de la diaspora investissent dans l’immobilier, dans des entreprises et sur les marchés de capitaux. Parfois, ils mettent leurs fonds en commun avec ceux d’amis ou créent un consortium de placement. Cependant, en l’absence d’instruments financiers formels pour structurer et cibler ces investissements, ces efforts resteront isolés et n’agiront qu’indirectement sur le développement.« La diaspora africaine est organisée et impatiente de se lancer », affirme Chukwu-Emeka Chikezie, cofondateur de l’organisation londonienne AFFORD (African Foundation for Development). Cet ancien émigré de retour en Sierra Leone, est aujourd’hui consultant sur les questions de développement liées à la diaspora.Selon lui, les diasporas d’Afrique commencent à pouvoir utiliser « des outils conçus pour canaliser leurs ressources ». Western Union et l’USAID (l’agence du gouvernement américain chargée du développement international) se sont ainsi associés pour proposer aux chefs d’entreprise de la diaspora installés aux États-Unis un service (African Diaspora Marketplace) qui leur permet d’apporter des capitaux dans des projets porteurs en Afrique subsaharienne.Dans ce contexte, la Banque mondiale a pour objectif de formaliser la situation en mettant en place des structures qui permettent aux pays de mettre directement au service de leurs objectifs de développement les relations qu’ils entretiennent avec leur diaspora. Les « obligations diaspora » constituent à cet égard un instrument d’épargne des particuliers très prometteur. Ce type de titre de faible montant est destiné aux membres de la diaspora qui ont de l’argent de côté mais ne savent pas structurer cette épargne, contrairement à un chef d’entreprise.

Ici, l’émetteur et l’acheteur sont tous deux gagnants, explique Dilip Ratha. Alors que c’est généralement la raison qui guide les placements des investisseurs fortunés, c’est le cœur qui fera investir les membres de la diaspora. Un État « peut faire vibrer cette corde affective pour proposer une rémunération plus faible, 4 % par exemple », précise-t-il, soit nettement moins que le taux à deux chiffres récemment retenu pour un bon du Trésor ghanéen à un an.Du point de vue de l’acheteur, dans la mesure où ces titres sont spécifiquement destinés à la diaspora, un rendement de 4 % est largement plus avantageux qu’un compte d’épargne bancaire classique ou que la thésaurisation.

Il existe aussi les avantages plus immatériels et, idéalement, une émission d’obligations diaspora doit associer la communauté émigrée au choix et à la conception des projets financés.En d’autres termes, l’État ne doit pas oublier que de nombreux membres de la diaspora sont partis à cause de la mauvaise gouvernance et qu’ils ne sont pas animés d’une flamme patriotique ardente.

La diaspora, c’est aussi un capital humain constitué grâce au transfert de connaissances opéré vers les pays d’origine par le biais de la collaboration, du mentorat ou de la formation.

Mamadou Ben

SoonniNews🌍

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